Il y a quelques semaines, on m'a sommé de me présenter au palais de justice comme candidat-juré. Au début, ça m’a énervé, ensuite ça m’a tenté, ce matin j’étais las…
Laissez-moi vous raconter mon expérience.
J’arrive au palais de justice, dans lequel je n’ai jamais mis les pieds, vers 8h55, donc 5 minutes avant le début du processus, qui pour moi, était jusqu’ici, l’équivalent du "groupe Gamma modulaire", i.e., le néant total.
Je pénètre dans la grande salle d’audience avec des gens aussi informés que moi sur la chose, je m’assois et j’attends. Quelques minutes plus tard, une jolie demoiselle en uniforme de gardien de sécurité (ou agent de la paix, je ne sais pas faire la différence dans ces conditions), nous demande de ne pas boire, de ne pas manger et d’éteindre nos cellulaires. Nous attendons tous patiemment lorsqu’une autre demoiselle, en robe rose-fuchsia à bretelle dévoilant 2 tatouages sur l’épaule droite, se présente comme le Shérif de la ville et commence à donner les consignes avant que le juge ne se présente. Quelques minutes plus tard, tout le monde debout : Son Honneur pénètre dans la salle.
Nous sommes 180 à être présents ce matin et 12 personnes seront choisies plus 2 suppléants – au cas ou -pour un total de 14. La cause en question est une affaire de parjure et de faux témoignages. Soulagement général, personne n’aura à faire face à un groupe de motards.
Le juge explique ensuite ce qu’il faut faire pour être exempté et à son départ de la salle, lorsque le Shérif revient pour constituer les groupes des personnes qui veulent se faire exempter, je vous l’assure, 120 personnes ont bondi.
J’ai le sentiment que ça va être long, alors je sors le bouquin que j’ai apporté et je commence à lire, il est 10h15. Un peu plus tard, je sors pour aller aux toilettes, je me sers un café et j’engouffre un muffin bananes-carottes, gracieusement fournis pour notre bien-être.
Je lève les yeux et regarde la grosse horloge sur le mur d’en face : 11h40. Je replonge dans mon livre et je relève les yeux 2 heures plus tard : 11h55. C’est interminable. Vers 12h30, environ une trentaine de personnes qui tentaient de se faire exemptées reviennent, la vraie sélection peut donc commencer. On appelle les 20 premières personnes pigées au hasard, je n’en fait pas partie. Ils disparaissent et l’attente continue. L’huissier revient, on appelle les 20 personnes suivantes, je suis le 5e du groupe.
Nous descendons, on fait la file selon l'ordre pigé et j’attends mon tour. Mon tour arrive.
En face de moi, les 12 personnes choisies et le juge. À ma gauche la Défense, à ma droite la Couronne.
Juge : Monsieur S., pourriez-vous me dire ce que vous faites comme travail sans me donner le nom de votre employeur ?
Moi : Je suis p…
Juge : Défense ?
Défense : Suppléant.
BANG ! Je suis juré suppléant. On m'ordonne de me présenter mardi matin au même endroit afin que l’on me dise si je dois remplacer un des jurés déjà choisi.
Si vous saviez à quel point j’avais le goût de sauter sur la table et de pisser dans les rallonges auburn de l’avocate qui n’a même pas daigné levé les yeux pour me regarder et de lui faire comprendre que je suis la pire des personnes à faire parti d’un juré… S’il n’y avait pas eu le juge sur place, elle aurait vécu son premier golden shower.
On me montre la sortie. Pas d’explications, pas de justifications, rien. Je ne comprends qu’une seule chose : on te choisit pour ce que tu fais, et non ce que tu es. Si j’avais dit médecin, on me foutait dehors sans questionnement mais comme je n’ai pas de titre, même pas de position, je dois donc, en principe, me lover dans les déchets que forment ces détritus de la société…
Je sais que j’exagère et honnêtement, en d’autres circonstances, j’aurais adoré avoir été choisi (malgré que l’on sait d’avance qu’avec moi, l’accusé ne part pas en terrain neutre), mais aujourd’hui ? Non. Je n’ai pas la tête à ça, j’ai le cerveau en bouillie, les muscles fatigués et je n’ai pas le goût d’entendre tout ce que je vais peut-être entendre.
*Soupir*
À suivre…
ouin toute une aventure. j'ai hâte de lire ce que ça va être si jamais t'es obligé d'en être.
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